Je suis rentrée et je me suis flanquée dans mon lit avec de la bouffe. La recette des grands jours, vous me direz. Parce que tous ensemble entre nous, y en a pas un pour rattraper l'autre. Y a juste ma mère, qui rentre jamais avant 7 heures de toute façon.
J'ai donc jeté de côté tout ce que j'avais à faire, adieu responsabilité et autres gâches-métier, je me suis mis là au chaud et j'ai allumé la chaîne stéréo. Le tout Elvis était encore dedans, et j'ai bien écouté, sans préjugés pour une fois. C'est désuet. Comme moi. Allongé sur mon lit en chaussettes. Si je fumais, et que je le faisait à l'intérieur, je me serait grillée une cigarette, tellement l'instant semblait approprié. Je me suis mis à réfléchir. Je sais, mauvaise idée.
J'avais été à une réunion de famille. Du côté où elles sont bien moins fun que de l'autre. Et où elles tirent en longueur. Mon parrain, qui est aussi mon cousin, était là. Présent, mais ailleurs. Il m'a offert un livre -- parce qu'on a fêté la Noël seulement maintenant, et oui -- de Harry Mulisch, un type que mon parrain admirait (si je vous dis qu'il est journaliste, vous comprendre peut-être) et dont je lui ai annoncé la mort moi-même. Il n'était pas encore au courant. Une brique de 900 pages, imprimé pas très grand. Je lui ai demandé comment allait sa femme, il se sont mariés début de l'année passée, et elle s'était salement cassé la jambe (triple ou quadruple fracture, opération à la clé, réhabilitation après) début octobre. "Bien," il m'a répondu. Je pensais qu'il faisait allusion à sa jambe. "Je sais pas si tu sais, mais elle a fait une fausse couche." Elle était enceinte? Première nouvelle. Je ne lui en veut pas de ne rien avoir dit. C'est leur couple, leur choix. Mais j'ai pitié de Gaëlle. D'abord elle se casse la jambe, crève de mal et est HS pendant des mois, et en plus elle fait une fausse couche. J'étais horriblement mal à l'aise. J'aime ces gens, mais c'est quoi la bonne réaction face à une annonce pareille? Je sais que Gerald veut des enfants, je sais qu'il devait être dévasté à l'intérieur. Bon dieu qu'il le cache bien. J'aimerais pouvoir cacher les choses comme il le fait. A la recherche de la bonne réaction, je l'ai regardé parler à ma cousine. Sa réaction à elle était "Oh, zut.". Légère expression d'effroi sur le visage. Je savais toujours pas. Et je me faisait du souci: est-ce que Gerald avait le droit de balancer ça comme ça.? Et Gaëlle? Qu'est-ce qu'elle en dirait?
Je pensais à tout ça, allongée sur mon lit, m'imaginant dans des volutes grises presque opaques en train de faire des anneaux de fumée. Et ce moment là, le destin, ce petit con, s'est mis en tête que de jouer 'Don't Cry Daddy' était une bonne idée. L'ironie du moment était tellement forte que ça aurait pu être du cynisme. Une grimace me contorsionnait le visage et une bile amère me montait à la gorge. Et comme à chaque fois que s'est arrivé dernièrement, j'ai pensé à lui.
Il n'a rien à voir avec tout ça. C'est juste que ça fait mal d'y penser, c'est tout. Ça fait toujours mal d'être en face de ses propres erreurs et de devoir réaliser à quel point on est lâche, nulle, ou pur et simplement de la merde.
Le problème est simple, et la situation sur-utilisée dans chaque livre, film ou pièce de théâtre où un amoureux ou une amoureuse est présent(e) parmi les personnages: le triangle amoureux. C'est la plus vieille histoire de toutes qui pour une certaine raison a toujours du succès. Je me demande bien pourquoi, d'ailleurs: il y a toujours un malheureux quelque part dans l'équation 'Je l'aime, il l'aime, elle l'aime ou ne l'aime pas'.
La réponse est simple, comme la plupart des bonnes réponses. Dans les films, les bouquins et les pièces, ils s'arrangent. Quelqu'un du triangle est suffisamment détestable pour qu'on s'en fiche qu'il ou elle termine seul(e). Mais dans la vrai vie, les choses ne marchent pas comme ça. Personne n'est totalement détestable. Chaque assassin est probablement le vieil ami de quelqu'un, dixit la Queen of Crime.
La réponse est simple, comme la plupart des bonnes réponses. Dans les films, les bouquins et les pièces, ils s'arrangent. Quelqu'un du triangle est suffisamment détestable pour qu'on s'en fiche qu'il ou elle termine seul(e). Mais dans la vrai vie, les choses ne marchent pas comme ça. Personne n'est totalement détestable. Chaque assassin est probablement le vieil ami de quelqu'un, dixit la Queen of Crime.
Et non, y a personne d'autre. Un(e) de perdu(e), dix de retrouvé, mon œil, oui: un(e) de perdu(e), un(e) de tout seul! Merci Gad Elmaleh! Essaye donc de lui dire, toi, à un amoureux, qu'il y en a d'autres. Il s'en fout des autres! Et n'allez pas me contredire, je l'ai déjà fait, je parle d'expérience.
Raisonner avec un amoureux, ça n'a pas de sens, parce qu'il n'y a pas de logique dans l'amour.
Et quand il s'agit de le convaincre qu'il y en a d'autres ou qu'elle n'en vaut pas la peine, vous comprendrez que vous pouvez aller vous brosser.
Ah, l'adolescence douce-amère... Je l'aime, il l'aime, elle l'aime ou ne l'aime pas.
Raisonner avec un amoureux, ça n'a pas de sens, parce qu'il n'y a pas de logique dans l'amour.
Et quand il s'agit de le convaincre qu'il y en a d'autres ou qu'elle n'en vaut pas la peine, vous comprendrez que vous pouvez aller vous brosser.
Ah, l'adolescence douce-amère... Je l'aime, il l'aime, elle l'aime ou ne l'aime pas.
Non, la situation est vraiment simple et se résume à ça: je l'aime, il ne m'aime pas, je bouffe du chocolat.